Le Ouija pour communiquer avec les défunts

Le Ouija, l’équivalent du Iphone pour communiquer avec les défunts ?

Des soeurs un peu bizarres, un croque-mort, un homme d’affaire opportuniste mais génial. Le OUIJA l’histoire fascinante de la planche parlante, équivalent du iPhone pour communiquer avec les défunts.

Hydesville, Californie, 1848, très exactement dans la nuit du 31 mars, les trois filles du pasteur Fox, Leah, Maggie et Kate sont réveillées par des bruits qui semblent sortir des murs de leur maison. 

En ce début du 19ème siècle, le spiritisme n’en est qu’à ses balbutiements en Angleterre et en France mais nombreux sont ceux à croire à la survivance de l’esprit après la mort et donc à la possibilité, pourquoi pas sur un malentendu, d’entrer en contact avec ses chers défunts.

Cette histoire de survivance de l’âme est ancrée dans toutes les anciennes cultures et les rites funéraires depuis l’origine de l’humanité, mais nous sommes en pleine révolution industrielle, ça ferait mauvais genre de parler de coutumes primitives, alors chacun garde pour soi ses croyances et bricole dans son coin des rituels pour garder le liens avec ses disparus. 

Revenons à nos trois sœurs qui profitent d’un phénomène d’hystérie collective autour de leur histoire pour monter un petit business florissant de démonstration publique. Elles se prétendent être des médiums capables d’interpréter les mystérieux « coups ».

Esprit es-tu là ? Toc toc toc, merci ça fera 3 dollars….

Avril 1886, le très sérieux New York Times publie un article sur les sœurs Fox, en les sacrant fondatrices du spiritisme. Pourtant à ce moment le mouvement avait pris de l’ampleur et comptait plus de huit millions d’adeptes aux Etats Unis, en Angleterre et en France, passons. 

Il y a autre chose à dire sur le manque de sérieux des journalistes du NY Times car s’ils avaient fait un peu de recherches, ils auraient trouvé les écrits d’Emmanuel Swedenborg, un noble suédois, qui dès le début du 18ème explorait l’au-delà et affirmait communiquer avec les esprits des défunts tout en restant conscient. 

Mais soyons beaux joueurs, considérons le 31 mars 1848 comme la date de naissance du spiritisme (littéralement : la croyance en une communication possible avec les défunts).

Les séances de spiritisme se mettent alors à fleurir, des médiums auto proclamés font payer (cher) leurs prestations au cours desquelles les participants tentent de communiquer avec les esprits des défunts (et les fantômes opportunistes) à l’aide d’une table tournante. Toutes les classes sociales sont touchées. Mary Lincoln, l’épouse du président américain, organise même des séances à la Maison Blanche pour entrer en contact avec son fils de 11 ans, mort prématurément. 

Le principe est simple : les participants s’assoient autour de la table, placent leur mains sur la surface, posent leurs questions et essaient de provoquer une communication avec le monde spirituel. La table peut alors bouger, pivoter, se soulever de manière erratique. C’est long, c’est fastidieux, les médiums doivent énoncer toutes les lettres de l’alphabet et attendre une réaction de l’esprit pour reconstituer la réponse sans réelle assurance de pouvoir communiquer avec ses propres défunts.

La douleur du manque et de la perte d’un être cher sont communes à tous les individus mais voilà, réserver la prestation d’un médium n’est pas à la portée de toutes les bourses. Aucun problème, l’au-delà est à tout le monde et une nouvelle méthode voit le jour : sur un papier, on écrit les 26 lettres de l’alphabet, les chiffres de 0 à 9, un oui et un non, un au revoir pour clore la séance poliment, on s’équipe d’un verre transparent pour servir de support de communication et hop, allô pépé, es-tu là ?

Cette méthode simple, accessible, qui peut même se pratiquer en solitaire fait immédiatement fureur. Des articles de journaux commencent à paraître au sujet du phénomène de « talking board » (littéralement tableau parlant) et voilà qu’entre en scène notre génie de l’entrepreneuriat ! 

Charles Kennard, est un homme d’affaires américain, qui constate cet engouement et sent immédiatement le bon filon. Il souhaite se refaire une santé financière après l’échec de ses inventions toutes baptisées “recettes secrètes” (la plupart du temps des mélanges d’engrais, d’os et d’huile de serpent). 

Il s’associe avec Ernest Christian Reiche, fabricant de cercueils (ça ne s’invente pas) et ensemble ils conçoivent un dispositif simple, portatif, qui donne la possibilité d’obtenir une communication fluide avec les esprits des défunts. 

Techniquement ils ont simplement gravé le principe de la talking board sur une planchette en bois de cercueil. Ils y ajoutent une sorte de palet appelé planchette en forme de goutte, pour remplacer le verre, muni d’un trou pour faire apparaître la lettre désignée par l’esprit d’outre-tombe, super efficace ! 

Mais voilà, ils ne trouvent pas d’investisseurs jusqu’à l’arrivée d’un troisième larron, Elijah Bond, un avocat qui prétend que sa belle-sœur est une puissante médium (oui cette indication a son importance vous allez voir). Les trois s’associent et la société Kennard Novelty Company, se constitue la veille d’Halloween (…).  

En 1891, Helen Peters (la fameuse belle sœur) arrive à convaincre le bureau des brevets américain et obtient la légitimité, pour la planchette, du gouvernement fédéral, l’équivalent de notre brevet, sous l’appellation : objet de communication avec les esprits. 

Comment a-t-elle fait ? Une histoire circule : Elle aurait défié l’agent des brevets de découvrir son nom grâce au OUIJA, oui ça sent l’entourloupe, une équipe de choc je vous dis  ! 

La beauté de l’esprit marketing de Charles et de sa bande repose également dans la commercialisation de la planchette avec cette simple phrase sibylline sur la boite d’emballage “jeu pour animer une fête ou encourager un peu d’intimité légère pour les couples romantiques”, je cite. 

Aucune explication n’accompagne l’objet, aucun mode d’emploi, juste cette phrase mystérieuse.

“Entre le savoir et l’inconnu, le matériel et l’immatérielle, OUIJA répond sur le passé, le présent et le futur avec exactitude” 

L’objet se trouve dans les rayons des jeux de société, les premières publicités commencent à paraître dans les journaux: “OUIJA, la magnifique planche parlante pour communiquer avec vos défunts” et c’est un engouement immédiat. Dès le début des années 1893, 2000 planches de ouija sont vendues par semaine. La Kennard Novelty Company passe d’une seule usine à six dans le pays et une au Royaume-Uni.

Charles Kennard et Elijah Bond quittent la direction de l’entreprise et William Fuld, un de leurs employés, les remplace. Et bien que William n’ait jamais prétendu avoir créé le Ouija, les journalistes du NY Times, décidément des champions de l’information, le présentent comme l’inventeur de la planche parlante. 

Et pourquoi le OUIJA s’appelle OUIJA  ? Personne n’en sait rien, je vous laisse choisir votre version  

  • Le nom OUIJA est un terme mystérieux et intrigant qui pourrait être une combinaison du mot français “oui” et du mot allemand “ja”, qui signifient tous deux “oui”. 
  • Le nom OUIJA a été choisi par la planchette elle-même lors d’une séance de spiritisme entre les  associés. « Comment devons-nous t’appeler ? » aurait demandé Helen Peters à la planche. Les lettres : O, U, I, J, et A auraient alors été désignées. Qu’est-ce que cela veut dire ? a t-elle poursuivi (pour une médium puissante ça laisse à désirer) « Bonne chance », aurait répondu la planche.
  • Une autre légende raconte que le nom OUIJA est en fait une combinaison des prénoms des sœurs Fox.

Un peu de culture G

Norman Rockwell, l’illustrateur de la vie quotidienne américaine, a peint un prétendant bien habillé et une jeune femme (le fameux couple romantique qui a besoin d’encouragement pour une intimité légère), des chaises tirées face à face, jouant avec une planche Ouija pour la couverture du Saturday Evening Post en 1920. 

Moins connue est l’utilisation du Ouija comme source d’inspiration par des auteurs de renom, comme  la poétesse Sylvia Plath, qui explore le thème de la communication avec l’au-delà à travers l’utilisation d’une planchette Ouija dans son poème : Dialogue over a Ouija Board  ou encore, le lauréat du prix Pulitzer, James Merrill, qui s’est servi de ses notes de consultation du Ouija (où il dialogue directement avec l’archange Saint Michel, excusez du peu),  pour écrire un poème de 560 pages (Saint Michel est donc bien bavard), The Changing Light at Sandover.

Et maintenant on démonte tout en deux parties

1/ Oui il y a une explication scientifique et elle est magique !

Des recherches très sérieuses menées à l’Université de la Colombie-Britannique par Sidney Fels, professeur de génie électrique et d’informatique, montrent que cela fonctionne vraiment, mais pas de la façon dont nous pouvons le supposer. Avec son collègue Ron Rensink, professeur de psychologie, Sidney tente une expérience : 

Des participants qui devaient répondre à une série de questions difficiles avaient raison environ 50 % du temps. 

Puis, ils ont équipés les participants d’une planche parlante en spécifiant que le palet de la tablette Ouija était un robot qui transmettait par mouvements, les réponses d’une autre personne en téléconférence (sur le principe du fameux appel à un ami de Qui veut gagner des millions).

A cette nouvelle série de questions, les participants ont alors obtenu une note correcte dans plus de 65 % des cas. En réalité, vous vous en doutez, c’était une ruse, il n’y avait ni robot ni personne en téléconférence.

Oui mais, le taux de réponses positives étaient pourtant meilleures !?!

L’explication avancée est que l’inconscient est capable de récupérer des morceaux d’informations stockées qui ne sont pas accessibles à l’esprit conscient.

Mémoire consciente vs mémoire inconsciente

La mémoire inconsciente fait référence à la capacité de stocker des informations, des expériences et des émotions sans conscience (consciente) de les avoir mémorisées. 

Elle représente une forme de mémoire implicite qui influence nos pensées, nos comportements et nos sentiments sans que nous en rendions forcément compte.

Une grande partie de notre expérience quotidienne est stockée dans notre mémoire inconsciente. Cela inclut des détails sur des événements passés, des interactions sociales, des connaissances acquises et des réponses émotionnelles (voire pour le psychiatre Jung des informations transmises par nos ancêtres, une sorte de mémoire inconsciente collective cette fois-ci). 

La mémoire inconsciente traite et stocke les informations de manière différente de la mémoire consciente. Alors que la mémoire consciente implique une récupération délibérée des souvenirs, la mémoire inconsciente est activée de manière involontaire et automatique.

Le OUIJA (tout comme l’hypnose ou la méditation) permet d’accéder à ces informations subtiles, ce qui rend les réponses obtenues troublantes de vérité ou dans le cas de l’expérience du professeur Sidney Fels, de mettre à jour un savoir acquis mais non conscientisé. 

2/ Oui il y a une explication physiologique et elle est (aussi) magique

Le mécanisme à l’œuvre dans la pratique du OUIJA  est  connu sous le nom d’effet idéomoteur, identifié une première fois en 1852 par le Dr. William B. Carpenter.

L’effet idéomoteur est l’influence de l’inconscient sur les mouvements musculaires ou plus simplement la capacité de l’inconscient à diriger l’activité motrice.

Vous allez voir c’est tout simple : si on vous parle de poux vous vous grattez la tête sans y réfléchir. Si vous détestez les araignées, et que l’on vous parle d’une tarentule velue, votre corps va être  agité de tics nerveux. 

C’est l’effet idéomoteur, un phénomène physiologique qui se produit lorsque des mouvements involontaires sont générés par des suggestions ou des attentes inconscientes. 

En d’autres termes, les personnes peuvent effectuer des mouvements sans en avoir conscience, souvent en réponse à des idées ou à des stimulus qui leur sont présentés. 

C’est en raison des attentes et des croyances en la capacité du OUIJA à fonctionner, qu’ inconsciemment sont générés, par les participants, des mouvements qui dirigent la planchette vers les différentes lettres. Il n’y a pas de force extérieure ou surnaturelle, mais une grande envie de connexion avec l’au-delà. 

Trop de films (à commencer par l’Exorciste) ont dénaturé l’utilité première de la planchette, celle de réconforter le cœur de ceux qui pleurent leurs disparus et c’est dommage. Explication scientifique ou pas, réputation sulfureuse, manifestations surnaturelles ou énorme arnaque, essayez par vous même pour voir, revenez à la base :  une feuille de papier et un verre transparent,  allô pépé es-tu là …?  😉

Au fait, une des sœurs fox a avoué, 40 ans après, que les coups entendus dans leur maison n’étaient qu’un canular…..

Mode d’emploi du OUIJA pour communiquer avec les esprits des défunts

  • Rassemblez quelques amis. Techniquement le OUIJA peut être utilisé seul mais il est préférable d’y jouer avec au moins une personne surtout si c’est par une nuit sombre et orageuse. 
  • Avant de contacter l’autre monde, mettez-vous dans l’ambiance en tamisant les lumières, en allumant de l’encens, en utilisant des bougies
  • La planche OUIJA peut être très réactive ou peut sembler complètement endormie, le mieux est d’essayer pendant la nuit ou à l’aube. 
  • Prenez place, dans la conception originale on doit mettre la planche sur les genoux de deux participants, leurs genoux se touchant. Il était également précisé qu’il était préférable qu’il s’agisse d’une dame et d’un gentleman. Vous pouvez néanmoins, vous installer à une table ou au sol, tant que tout le monde peut voir clairement et garder les doigts sur le palet. Attention, il peut bouger rapidement. 
  • Soyez patient, parfois la planche a besoin d’un peu de temps pour s’échauffer. Vous pourriez ne pas obtenir de réponse tout de suite N’abandonnez pas. SI votre planche vous donne l’impression d’une connexion bas débit, ne vous énervez pas. Attendez ou recommencez plus tard.
  • Soyez poli. Si vous rencontrez un esprit qui communique beaucoup, parlez-lui, soyez gentil, cela l’encouragera à coopérer. Vous pourriez également ne pas obtenir les réponses que vous voulez, ce n’est pas de la faute de l’esprit, ni celle de la planche.
  • Commencez simplement. Il est préférable de ne pas bombarder votre esprit de questions, faites simple, comme lors d’une conversation normale. Vos premières questions doivent appeler des réponses faciles et courtes, par exemple : combien y a-t-il d’esprits dans la pièce ? Êtes-vous un bon esprit ? Quel est votre nom ? 
  • Faites attention à ce que vous demandez. Si vous ne voulez pas connaître la réponse à une question, ne la posez pas. Ne faites pas perdre son temps à l’esprit. Ne demandez jamais de manifestation physique, cela revient à chercher des ennuis, enfin ne croyez pas tout ce que la planche OUIJA vous dit. 
  • Désignez un participant pour tenir le rôle du médium, lui seul qui posera les questions. 
  • Placez la planchette sur le G pour commencer. Demandez aux participants d’appuyer très légèrement mais fermement avec leur index et leur majeur. 
  • Déplacez très lentement la planchette en rond pour que le OUIJA s’échauffe avant d’entamer une communication avec les esprits des défunts.
  • Créer un rituel d’ouverture : une prière, une parole de bienvenue. Le médium doit ensuite accueillir l’esprit et rappeler à voix haute que seul les énergies positives sont les bienvenues.
  • Si l’esprit précise qu’il est mauvais, il est mieux de stopper le jeu. Si vous commencez à recevoir des réponses vulgaires ou grossières, n’y répondez pas, dites au revoir et stoppez le jeu. 
  • Concentrez-vous, pour obtenir des résultats efficaces, tous les joueurs doivent faire le vide dans leur esprit et se concentrer sur la question posée. Si l’un des participants rigole ou pose des questions ridicules, faites le sortir de la pièce. 
  • Attention parfois les réponses sont longues et doivent être écrites. 
  • Si la planchette commence à faire des huit, à réciter l’alphabet à l’envers ou à décompter de 9 à 0, mettez fin à la séance en disant tout simplement au revoir. Si l’une de ces trois choses se produit, cela signifie que l’esprit essaie de fuir la planche.
  • Ne mettez jamais fin brutalement à une séance, c’est au médium qu’il revient la responsabilité d’annoncer la fin de l’échange et de déplacer la planchette sur AU REVOIR.

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3 commentaires

  1. Bonsoir
    C’est très intéressant toujours est-il que ça fait un peu peur quand même quoi que en lisant donc je me demandais si il fait effectivement si c’était pas notre inconscient qui faisait bouger la goutte et qui amène la réponse mais qui est en nous en fait et donc pour quelle raison les gens aiment consulter ou faire la ouija je dirais le lien de désespoir l’amour le réconfort donc j’ai pas pu imprimer parce que j’ai pas d’imprimante mais je vais utiliser celle que j’ai ça fait des années qu’elle est dans une boîte et là je la sors je vais l’essayer
    Merci

  2. Bonjour Vanessa,
    Tout d’abord merci de ce partage, très intéressant, mais ça fait carrément peur.

    Comment trouver les bonnes personnes pour effectuer un tel rituel ?
    Jouer avec la planche, ne nous met-il pas en danger en ouvrant une porte d’entrée dans notre quotidien, même si nous y jouons pas ?
    Toutes ces interrogations et l’atmosphère obscure autour de cette activite fait vraiment peur .

    Bien à vous

    1. Si cela te fait peur, surtout évite de tester 😉
      J’ai uniquement partagé l’histoire incroyable de cet objet, les jolis petits arrangements des journalistes et surtout deux explications scientifiques du phénomène.Le reste t’appartient mais si cela te semble obscur, n’y va pas bien sur !

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